Les chefferies traditionnelles

Informations générales

Les Chefferies traditionnelles au Cameroun sont un échelon de l'organisation administrative au Cameroun. Elles sont régies par un décret de 1977 qui classe les chefferies traditionnelles en 3 niveaux : Chefferies de 1er degré, de 2ème degré et de 3ème degré. 

Evolution administrative des Chefferies traditionnelles

1909 : Theodor SEITZ, gouverneur impérial allemand, accorde, au moyen d'une circulaire, un traitements  à certains chefs de communautés SAWA

1933 : Par l'arrêté N° 244 du 4 février 1933, le gouverneur français Auguste François BONNECARRERE, fixe le statut des chefs coutumiers.

1960 : Indépendance du Cameroun oriental.

1960 : Vote de la loi N° 7/SC du 10 décembre 1960 sur la reconnaissance des chefferies du territoire camerounais.

1961 : Modification de la loi de 1960 pour tenir compte du changement de la forme de l'Etat, désormais fédéral.

1977 : Le décret N° 77/245 du 15 juillet 1977 organise les chefferies traditionnelles en 3 niveaux hiérarchiques et consacre le Chef traditionnel comme auxiliaire de l'Administration.

1979 : La loi N° 79/17 du 30 juin 1979 règle les contestations soulevées à l'occasion de la désignation des chefs traditionnels

1980 : La loi N° 80/31 du 27 novembre 1980 dessaisit les juridictions des affaires relatives aux contestations soulevées à l'occasion de la désignation des chefs traditionnels.

1996 : La nouvelle Constitution qui consacre la décentralisation, donne accès au Sénat et aux Conseils régionaux à la chefferie traditionnelle

2013 :  Le décret N° 2013/332 du 13 septembre 2013 modifie et complète celui de 1977.

2015 : Le décret du 13 Septembre 2015 améliore substantiellement les allocations perçues mensuellement par les chefs traditionnels.

Pouvoir juridictionnel coutumier

Il a progressivement été mis à l'écart, car jugée contraire à l’idéologie de développement. Le glas a sonné lorsqu'en "1963, la Cour suprême du Cameroun a proclamé que dans les matières où il a été légiféré, la loi l’emporte sur la coutume."

Néanmoins, "en marge du système juridique étatique, malgré l’existence des juridictions traditionnelles, continuent de fonctionner des systèmes de droits traditionnels, organisés autour des communautés ethniques".

Source : La gestion de la pluralité des systèmes juridiques par les États d’Afrique noire : les enseignements de l’expérience camerounaise Pierre-Étienne Kenfack p. 153-160

 

Organisation

Selon le décret de 1977, les chefferies traditionnelles sont organisées sur une base territoriale et comporte les 3 niveaux hiérarchisés suivants : 

  • Chefferie de 1er degré comprenant au moins deux chefferies de 2eme degré. Ses limites territoriales n'excèdent pas, en principe, celles d'un département. 
  • Chefferie de 2ème degré comprenant au moins deux chefferies de 3eme degré. Ses limites territoriales n'excèdent pas, en principe, celles d'un arrondissement.
  • Chefferie de 3ème degré correspondant au village ou au quartier. 

 

Les Chefs traditionnels sont, en principe, choisis au sein des familles qui assurent coutumièrement le commandement traditionnel. 

 

Si le choix du Chef est fait après consultation préalable des « notabilités coutumières », il est obligatoirement validé par le premier Ministre qui désigne le Chef de 1er degré, le Ministre de l’Administration territoriale, pour le 2ème degré et le Préfet pour les chefs de 3ème degré.

 

Succession dans les chefferies traditionnelles : mode d’emploi

Le décret présidentiel du 15 juillet 1977 fixe le cadre dans lequel doit se dérouler la procédure, en tenant compte des us et coutumes des différentes communautés.

 

Peu importe l’aire culturelle, la succession dans une chefferie traditionnelle se fait généralement de père en fils. Le trône revient le plus souvent à l’aîné. Il arrive aussi que le chef, de son vivant, désigne directement son successeur. Il peut également laisser un testament confié aux notables qui sont tenus de l’appliquer. Lesquels notables peuvent aussi procéder eux-mêmes au choix selon les règles de la communauté, dans le cas où un successeur clairement identifié n’a pas été choisi par le défunt monarque. Lorsque les options masculines ont été puisées, c’est l’une des filles du chef qui lui succède. Dans tous les cas, à côté des aspects traditionnels et mystiques, le processus ne peut se faire en marge de la règlementation. 

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Indicateurs-clé

Chiffres nationaux

Année Chefferies 1er degré Chefferies 2ème degré Chefferies 3ème degré
 2015 80 882  12.582

Répartition par régions (Chiffres de 2015)

Année Chefferies 1er degré Chefferies 2ème degré Chefferies 3ème degré
ADAMAOUA 6 17  
CENTRE 7 166  
EST 7 59  
EXTREME NORD 19 159  
LITTORAL 11 50  
NORD 5 33  
NORD-OUEST 5 123  
OUEST 11 108  
SUD 3 105  
SUD-OUEST 6 42  

Documentation

Documents d'organisation

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DECRET N°2013_332 DU 13 SEP 2013 modifiant et complétant certaines dispositions du décret n°77_245 du 15 juillet 1977 portant organisation des chefferies traditionnelles
DECRET N°2013_332 DU 13 SEP 2013 modifia
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Décret n°77/245 du 15 juillet 1977 portant l’organisation des chefferies traditionnelles
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Arrete N°57 Minat/Minfi du 26 fevrier 1983 portant calcul de l'allocation a verser aux chefs traditionnels de 1er et 2nd degré.
arretfixant.pdf
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Etudes, rapports

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La chefferie traditionnelle au Cameroun ambiguités juridiques et derives politiques by Charles Nach MBACK
La chefferie traditionnelle au Cameroun
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La concession de la chefferie traditionnelle, lieu public ou lieu privé ?

Analyse sociojuridique d’une curiosité par Pierre-Claver Kamgaing

in Les ANNALES DU DROIT

RESUME :

Le régime applicable aux réunions et manifestations varie selon qu’elles se tiennent dans un lieu public ou un lieu privé : une réunion ou manifestation dans un lieu public est soumise à une obligation de déclaration préalable. À la faveur de l’actualité sociale récente au Cameroun, on est amené à s’interroger sur le statut de la concession de la chefferie traditionnelle, entendue comme étant la superficie de terrain, bâtie ou non, qui constitue l’environnement immédiat du chef. On se demande notamment si la concession de la chefferie est un lieu public ou un lieu privé. Il s’agit là d’une question dont la difficulté est ancienne et illustre la difficulté de coexistence entre le droit coutumier et le droit moderne. Une partie de la doctrine publiciste, par une interprétation restrictive des dispositions légales – elles même mal rédigées – a conclu que toutes les concessions de chefferies traditionnelles appartiennent au domaine public artificiel de l’État. À ce titre, elles seraient donc des lieux publics. Or, une analyse des données sociologiques et historiques, permet de replacer le texte législatif dans son contexte. Il en résulte que selon l’identité de celui qui détient un droit de propriété sur les terres (État, collectivité villageoise, chef) le statut pourra changer. Ainsi, la concession pourra être un lieu public ou un lieu privé ouvert au public. En fonction du statut, le régime des réunions et manifestations publiques pourra varier considérablement au Cameroun.

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Dénomination et territorialité urbaines, chefferies traditionnelles et question identitaire en pays bamiléké au Cameroun par Ibrahim Mouiche
denomination-et-territorialite-urbaines-
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Les chefferies traditionnelles Beti au Cameroun par  Vincent de Paul Ndougsa · 2018.  Préface de Jacques Deboheur Koukam.

 

Note de l'éditeur : "Cet ouvrage est une réflexion sur le déclin du pouvoir traditionnel en Afrique. Il retrace le rayonnement passé de ces chefferies qui ont servi d'arrière-plan à l'administration publique et qui ont grandement oeuvré pour l'indépendance du Cameroun. L'auteur relève un revirement de ces pouvoirs culturels qui se sont dénaturés dans le copinage avec le pouvoir politique. Cette confusion de rôles et de positionnements va entraîner un effritement progressif des cultures beti. Dans une démarche qui consiste à provoquer le développement du Cameroun à partir des cultures particulières, on peut constater un manque d'organisation et une perte d'autorité des guides ou chefs de communautés, qui amoindrissent le potentiel culturel immense que ces peuples revendiquaient par le passé. L'exemple des chefferies des régions du Nord, du Nord-Ouest et de l'Ouest est mis en valeur pour montrer l'enjeu des pouvoirs traditionnels dans la sauvegarde des cultures et la préservation des identités. Le pouvoir traditionnel est alors considéré comme le gardien de l'âme d'un peuple. Les citoyens doivent y recourir pour se retrouver avant de se projeter dans leur pays et dans le monde. D'où la nécessité, pour les sociétés beti, de repenser leur relation au pouvoir traditionnel."

 

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Les principaux paragraphes du livre de Vincent de Paul Ndougsa
Contenu du livre de Ndougsa sur les chef
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Autorités Traditionnelles et Pouvoir Politique au Cameroun : Captation Politico-Juridique et Mobilisation des Ressources d´Adaptation et de Maintien Par Jean Njoya
0506-7286-2023-2-419.pdf
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Résumé : Ce texte scrute la dynamique des chefferies traditionnelles au Cameroun en rapport avec le pouvoir politique. Il y est démontré qu’au contact de la colonisation, les chefferies traditionnelles ont subi des sérieuses attritions dans leurs agencements territoriales et dans leurs attributions. L’avènement de l’Etat indépendant a orienté le pouvoir politique vers une capture juridique et institutionnelle de la chefferie, dans le but d’en faire un bras séculier de l’Etat. Malgré cet effort de phagocytose, la chefferie traditionnelle est demeurée très structurante du champ social en le satellisant et en assurant une représentation culturelle légitime. Il en résulte que l’infrastructure de capture juridique des chefferies bien que très marquée par les prérogatives de la puissance publique, n’a que partiellement affecté cette institution ; puisqu’elle a transcendé cette capture à travers la mobilisation des ressources d’adaptation et de maintien dans le système politique ; et dans un contexte de modernité disruptive, le chef traditionnel est apparu comme un acteur stratégique dans la gouvernance locale. La chefferie tient ses rôles en raison d’un statut sui generis : ni totalement traditionnelle, ni totalement légale-rationnelle et parfois même faiblement charismatique. Aussi, les catégories wébériennes de l’Etat moderne se dissolvent-elles dans des hybridations baroques produites par l’institution traditionnelle. 

https://www.nomos-elibrary.de/10.5771/0506-7286-2023-2-419.pdf?download_full_pdf=1&page=1